lundi 27 janvier 2014

Dites moi... En quoi consiste votre métier... Exactement ?!

En dehors de mon addiction à Facebook et de ma passion pour les séries télé, il se trouve que j'ai aussi un job. Comme tout le monde, quoi.
Justement, l'autre jour, je m'amusais à fouiller sur Linkedin (par pur voyeurisme, mais aussi par curiosité...) pour mieux connaître les jobs de mes amis et de ma famille... Tout en farfouillant ce sympathique réseau social (encore un !) je me suis fait la remarque que mon job à moi, tout le monde le connaissait, ou tout du moins prétendait le connaître. Par souci d'honnêteté, je dois aussi reconnaître que ma copine Anne-Laure m'a soufflé cet article dans les bronches il y a quelques jours au cours de l'une de nos discussions sur internet ...!)

Donc moi je suis instit. Enfin PE. Enfin maîtresse. Enfin c'est moi la (gentille) dame à qui vous confiez votre progéniture le matin, et qui vous la rend le soir, beaucoup plus intelligente. Je sais, c'est pas scientifiquement prouvé, mais rêver ne coûte pas cher, donc j'ai bien le droit.

Notre sympathique métier, tout le monde pense le connaître, car il faut bien dire que nous en avons tous fréquenté au moins un ou une à un moment de notre vie. Le mien, enfin celui que je côtoyai quotidiennement pendant 4 ans dans la sympathique et typique et unique classe à 4 niveaux disponible dans notre village, je dois avouer qu'il était carrément flippant, le cheveu grisonnant, et on se marrait pas souvent avec lui , voire y en a qui pleuraient tous les jours : avant / pendant / après.

Bref, ceci serait l'objet d'un tout autre article, et donc revenons à nos moutons, nous les instits,  on est un peu comme les pompiers, les médecins et les policiers, tout le monde nous connaît.

Il faut dire également qu'il y a quelques années en arrière, un (brillant) producteur télé s'était mis en tête de populariser notre profession qui perdait un peu de son aura, en mettant en avant un de nos congénères, dans une production des plus fantaisistes. Hélas, le pauvre Victor Novak (hé oui, c'était là son nom, et non pas Gérard Klein, et encore moins "l'institermarché") nous a vraiment, vraiment cause du tort, et je tiens à le signaler ici. 



Pendant les 46 épisodes qui jalonnèrent ses 12 ans de carrière télévisuelle, il arrivait sur sa moto, tel le chevalier des temps modernes, pour officier dans une classe de 13 élèves, il habitait chez les gens ou à l'hôtel (?!!!!) pendant la durée de son remplacement, et il ne s'occupait pas que des gosses mais bien sur des parents; des voisins, de tout le village quoi.
Très sympa, l'instit. Trop sympa, à mon avis. Déjà, il n'a jamais du voir l'ombre de l'inspectrice, celui là, on ne lui a jamais fait remplir des PPRE ou mettre en place des PAI et des PPMS (L'éducation nationale a cette passion pour les sigles à coucher dehors, je n'en remettrai jamais...).
D'autre part, il a participé très largement à véhiculer deux idées totalement absurdes à mon sens :
Idée reçue 1 : Les instits ne foutent rien (je ne l'ai jamais vu faire son cahier journal ou corriger 90 cahiers / évaluations / rédactions chaque jour...).
Idée reçue 2 : Les instits ont beaucoup de pouvoir, et ils peuvent intervenir dans la vie des gens, voire tout arranger d'un coup de baguette magique, à la Merlin l'enchanteur.

Mais laissons ce pauvre Victor Novak repartir sur sa moto, et posons nous les vraies questions : enfin, LA vraie question... C'est quoi, un instit, et qu'en attendent les parents ? (Et pour répondre à cette question, dans un souci de confidentialité, nous n'emploierons que des noms d'emprunt)

Le confident / baby sitter / assistant social
Madame Ingalls était au portail de mon école, chaque matin, pendant les 8 années cumulées de scolarité de ses 2 enfants. Chaque jour, elle cherchait un motif pour me parler. La petite avait oublié son pull, elle avait eu du mal à apprendre sa poésie, elle avait fait un cauchemar la nuit d'avant, et puis le loto de l'école ça s'annonçait bien, et est-ce qu'elle pourra bien accompagner la sortie de fin d'année (demande formulée le 13 février pour le ... 25 juin. Véridique) Je vous laisse imaginer les trésors de patience et de sourire crispé qu'il faut à une personne normalement constituée pour subir cette attaque quotidienne PBI (pleine de (pseudo) bonnes intentions).... Jusqu'au jour où, inévitablement, on craque, et on lui répond, que la poésie, on s'en fout complètement, et que la sortie, elle est annulée, car cette classe est trop saoulante, ras le bol à la fin, et de toutes façons, sa fille, elle est nulle, en même temps vu la mère, faut pas s'étonner. Mais non, je m'égare, nous ne faisons pas ceci, nous gardons le sourire Ultra brite, et nous lui disons que c'est tout de même un tout petit peu tôt pour parler de la sortie, et que Lafontaine exagère un peu avec ses fables.
Pas plus que nous ne laissons les enfants dans la rue, le soir, à 17h15 (fin des cours à 16h30), sans aucune nouvelle des parents, très occupés à dormir. Véridique aussi, vu, revu, survu. C'est tentant, mais nous ne faisons pas ceci.


Le psy / éducateur spécialisé
Je me souviens fort, fort, fort bien d'un de mes élèves, le petit Max. Le petit Max a été dans ma classe pendant 2 années scolaires complètes, avec, fort heureusement, une coupure d'un an entre les deux. Ce charmant enfant ne semblait hélas pas tout à fait s'adapter au système scolaire. Il était, selon lui, victime d'un complot international des maitresses "toutes contre lui" qui "lui en voulaient" "ne comprenaient rien" "étaient méchantes" et qu'il détestait. 
Victime également d'un complot des autres élèves, qu'il "haïssait, cette bande de gogols" : la vie avec Max n'était que joie et bonheur au quotidien. Il attaquait souvent la journée par des cris, pour la finir par des hurlements. Quelques tentatives de fuite avec grimpage sur les poubelles pour passer par dessus le mur de l'école, des menaces d'appeler la police pour se plaindre de ses mauvais traitements, des courses poursuites dans la cour de l'école.... Sans oublier d'inoubliables jets de chaises, tables, et autres trousses, le tout en direction de la maitresse, alias moi (qu'il évitait savamment, pas si bête, le petit Max...). Un enchantement au quotidien.
Le petit Max est parti au collège. (ouf). Il avait donc passé 20 mois de sa vie en ma compagnie, et ce, jusqu'au dernier jour de sa scolarité élémentaire. Et pourtant, ce n'est qu'après seulement 4 mois de collège, pris en charge par ses 6... 7 ? 8 profs ? et une équipe de vie scolaire (CPE, principal and co...) qu'il fut invité à quitter l'établissement pour s'orienter vers d'autres cieux plus cléments (un internat plus adapté à ses besoins tout à fait spécifique). Rebaptisé IEB (internat pour enfants barrés) tout à fait OFF dans ma salle des maîtres. (Secret professionnel que je ne dévoile ici qu'en vue de vous faire marrer, cela reste donc entre nous). Si je tiens bien les comptes, un instit est donc carrément beaucoup plus fort d'un prof, ou carrément plus maso (Je n'arrive pas à décider).


Mais me voilà de retour sur Linkedin. Je lis les profils de mes amis, et me voilà toute éblouie. Ils parlent tous 3 langues, ont effectué des stages ou des tas de jobs avec des noms très savants (très souvent en anglais, apparemment, de nos jours, on n'est plus chef de produit, on est "Senor Product Manager"... tout un programme...). 
Et moi, je fais comment pour remplir mon cv Linkedin ? Je peux mettre "matteuse d'enfants récalcitrants de la ZEP du 19ème" de 2002 à 2006... Et puis "prof de gommettes" en 2008 / 2009...???
Pour finir avec "Educatrice / inspiratrice de culture pour rejetons de la génération TNT (Nabilla Power...) ???!

J'ai donc opté pour un profil qui se la pète un peu. Après tout je suis quand même prof d'eps, anglais, maths, histoire, géo, sciences, français, informatique, eps...
Je ne suis pas QUE instit. Je suis Prof de tout. Et conseillère d'éducation.
Bref, je suis trop forte. CQFD ! 


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