samedi 15 décembre 2018

T'es plutôt trail ou plutôt route ?


NDLR : Article satirique non bienveillant, toute ressemblance avec des faits réels ne serait que pure coïncidence absolument fortuite.

Apparemment, la vie se devrait d'être binaire. Ça se limiterait à une succession de questions fermées. Des Questionnaires à choix pas vraiment multiples. On se définirait, tel l'ordinateur, par une succession de 0 ou de 1.
Tu ne me crois pas ? En voici pourtant la preuve par 4. et non par 2.


T'es plutôt alcool ou plutôt dossard du dimanche ?

Le runneur qui se respecte ne picole pas avant une course. Il fait vœu d'abstinence alcoolique, telle la femme enceinte jusqu'aux yeux qui bave d'envie devant le mojito de sa copine célibataire (qui elle-même, bave d'envie devant le bidon rebondi de sa copine et sa future progéniture troooooop mignonne). Moi qui suis pourtant une fan de l'alcool (en témoigne ma passion pour les soirées champagne et mon adoration pour le oh combien dangereux 5ème mojito...), j'ai cédé aux sirènes de l'anti-alcoolisme sportif. 3 semaines entières avant le marathon sans une seule goutte d'alcool. La déshydration à l'état pur. La saint Yorre pour remplacer la Bière. Le calvaire (celui qui a déjà bu de la Saint Yorre 3 jours de suite me comprendra). Au point que je ne pense faire des marathons qu'un an sur deux. Comme désintox, ça me suffira.



T'es plutôt jeune ou plutôt vieille/vieux ?

Une mésaventure récente m'a rappelée que selon certaines (un peu tristes) personnes, le monde se divisait entre deux catégories d'âge. Les Jeunes peuvent s'afficher sur Instagram en courant en short, pose sympa, selfies sourire aux lèvres, cheveux au vent, photos accompagnés de textes motivants, de paroles de chansons dans toutes les langues stylées du moment. Les vieilles, quant à elles, doivent se contenter de faire la lessive et emmener leurs gosses à la musique. Oust, cassez vous des réseaux, le 3ème âge ! On arrête de se prendre pour des influenceuses et on assume son rôle de mère nourricière...
Je ne sais pas comment vous l'annoncer, les jeunes, mais être jeune, c'est avoir 18 ans et pour la célébrité ça se passe sur Snapchat,Tik Tok et Youtube, alors, faites de la place sur Insta, de toutes façons, dans 10 ans vous aurez 40 ans, il est temps d'être solidaire.


T'es plutôt Kilian Jornet ou plutôt Ryan Gosling ?

Dans la vie, tu dois faire des choix. T'as quand même pas cru que tu pouvais faire du SPORT et avoir une autre existence à côté ? T'as remarqué que Kilian ne faisait pas beaucoup de gras... Il ne s'empiffre pas de pizzas et de burgers tous les weekends, il n'attend pas le 15 septembre avec impatience pour attaquer sa 1ère raclette de la saison, dont il rêvait depuis le 15 mai (fin officielle de la saison de la raclette selon l'office international des raclettes). Kilian, lui, il court. Il bondit. Il vole au-dessus des sommets. Quand il va au ski, il n'est pas au chalet entrain de boire un vin chaud dès que 3 flocons volètent au-dessus de la piste verte. Quand il mange une fondue, il n'essaie pas de t'enfoncer la fourchette dans la main pour récupérer le bout de pain que tu as fait malencontreusement tomber. Kilian, il court léger. Et le rapport avec Ryan ? Aucun. Mais tous mes posts doivent comporter au moins une fois le nom de Ryan, c'est comme ça.


T'es plutôt trail ou plutôt route ?

Je veux pas balancer de noms, mais j'avais autrefois une amie qui me disait que les gens qui font du trail sont des ratés de la course à pied, qui compensent leurs chronos merdiques par le choix d'une sous discipline qui s'apparenterait davantage à la randonnée qu'au sport NOBLE qu'est le running.
C'est un fait, dans le monde des gens qui se baladent en courant, il y a deux écoles. Les routards seraient d'infames individus égoistes prêts à te pousser pour gagner une place au Scratch (le classement, pour les non initiés), tandis que le traileur serait un sympathique ami de la nature, prêt à secourir son prochain en cas de panne de barre de céréales (voire pire, panne de TUC!). Le traileur, en tant que looser, pourrait donc perdre du temps pour attendre ses copains de randonnée, n'ayant que faire du classement et du chrono, du moment qu'il ne se fait pas entuber par les infames barrières horaires (invention totalement injuste et contreproductive).
Note à tous ceux qui essaient de s'adonner aux deux disciplines : si vous vous sentez un peu schyzo, ce n'est PAS grave, tant que vous n'apportez pas vos bâtons de trail sur le marathon de Paris, tout se passera bien.

Conclusion en forme de Happy End :

Heureusement que non, la vie n'est pas binaire.
Il n'y a pas les gentils et les méchants. Même Luke Skywalker sait qu'il reste de la bonté dans Dark Vador.
On peut tous aimer la raclette, faire un marathon, boire des mojitos, courir un trail et être jeune d'esprit dans un corps de vieux.
J'ai toujours détesté les étiquettes, inutile d'essayer de m'en coller une sur le dos.

jeudi 19 juillet 2018

Facebook, Instagram, et moi et moi et moi


Déjà, je vois ton sourcil courroucé et ton œil suspicieux. Tu pensais que j'avais ENCORE arrêté mon blog. Que j'allais refaire une pause de 4 ans et que cette fois, tu ne serais plus là pour me lire à mon retour. Que nenni ! J'étais juste occupée à bosser, à m'entrainer et à aller à la plage.
Mais voilà qu'aujourd'hui il pleut pour la première fois depuis 3 semaines, (enfin, il ne pleut pas, c'est juste le ciel qui respecte mon capital solaire...), alors je vais te parler de ma 2ème passion après la course à pied (non, pas les MM'S...) les réseaux sociaux.


Facebook - l'époque des dinosaures

J'étais bien tranquille, en 2007, à raconter des conneries sur les forums de femmes enceintes, après avoir participé à des mondes virtuels, des chats collectifs et autres joyeusetés que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître. J'essaie pas de t'expliquer, si tu vois l'interface de ces dinosaures du virtuel, tu vas exploser de rire et recracher ta glace chocolat-amande-pistache sans gluten sans lactose sans sucre ajouté, et au prix qu'elle t'a coûté, je serais obligée de te faire un virement, donc on oublie.
Donc, j'étais sur copains d'avant et sur Doctissimo, quand ma cousine (une jeune) m'a parlé de « Facebook- tu connais pas ? – c'est génial ! – crée ton compte, voyons ! ». Et je me suis inscrite sur ce machin bleu et blanc tout en anglais auquel je ne comprenais absolument RIEN (le wall... les amis... et surtout l'affaire des Pokes... very obscur...) que j'ai laissé moisir dans un coin jusqu'à ce qu'il parle aussi français que moi et que j'y trouve enfin quelques connaissances lointaines à ajouter à mon micro cheptel d'amis virtuels.
Après avoir tracké ma famille, mes copains du collège les Augustins, ceux du lycée Xavier Marmier, puis mes potes de l'IUFM, j'ai entamé ma « grande période Facebook ».
Ce furent d'abord, les STATUTS PSEUDO MYSTÉRIEUX (extraits) : 
"Oh la la c'est fou ce qui m'arrive »
« Mauvais moment, c'est dur ! »
« Je ne sais pas comment je vais faire »
« Trop de chance aujourd'hui j'y crois pas ! » ... dont le but inavoué mais très facile à décrypter était de faire réagir les autres facebookiens, venus poser des questions, intrigués par cette accroche des plus obscures. 10 ans plus tard, quand je les relis, j'hésite à partir vivre en zone blanche (en Corrèze, par exemple) tellement c'était pathétique (mais je me rassure, on était nombreux à le faire, ce qui n'est pourtant pas nécessairement un signe d'intelligence).
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Puis, lorsque la photo nous a envahis, est venu le temps des innombrables clichés de mes mômes. Faut dire, elles étaient mignonnes. Et des jumelles, en plus, si c'est pas trop chou, comment s'en empêcher ! Tout allait bien, même si, au tout début, prendre des photos avec son appareil, brancher le câble, uploader tout ça, fallait vraiment avoir la foi et une motivation sans faille à montrer que ma vie était trop géniale (vu que les statuts ronchons n'avaient pas trop de succès, autant tester une nouvelle approche "perfect life happiness").
Tout ça dura bien gentiment à coup de « soirées mojitos » / « vacances à la mer » / « gaufres sur le port du Pouliguen »... jusqu'à ce que quelques personnes me répètent à de multiples occasions : « Ha oui, toi, tu es tout le temps sur Facebook » ou "ha ha tu racontes toute ta vie sur fesse de bouc".
Evidemment, des personnes qui n'interragissaient pas avec moi sur le réseau, jamais, et qui se contentaient de mater mes publications pour bien me faire remarquer un peu plus tard « en live » que j'étais une nolife avec une carte de fidélité premium que Mark Zuckerberg avait du me remettre en mains propres, lors d'une soirée au champagne, sans aucun doute.
Sourire crispé, réponse polie et un peu embarrassée, à la place de « Et donc toi aussi espèce de sous-marineuse de base qui passe son temps à mater mes publications mais ne peut même pas cliquer sur un pauvre petit like de peur d'abimer son vernis ! ».
Quelques crises existentielles plus tard (dont un sevrage d'un mois complet qui donna naissance à ce blog), je suis toujours inscrite sur le réseau. J'ai arrêté de poster certains trucs en soirée dont le seul propos était de montrer à certaines personnes que moi aussi je m'éclatais trop, bien qu'elles ne m'aient pas invitée à leurs 3 derniers apéros / dîners / concerts. Trop mesquin.
J'ai arrêté de penser que ma passion du running pouvait intéresser quelqu'un (à part ceux qui courent). Je continue à m'offusquer des conneries postées par certains de mes contacts (du genre, tableau comparatif qui prouve qu'au RSA c'est trop cool t'es un gros feignant mais tu gagnes plus que les braves gens qui bossent). J'ai cessé de croire que j'allais redevenir pote avec tous les gens que j'ai connu à 13 ans (déjà, car un certain nombre est fan du mouvement de Marine Le Pen...)
Facebook et moi, c'est je t'aime moi non plus, on est en phase d'observation, on se demande qui va quitter l'autre en premier, qui va récupérer la maison, et bien sûr, qui aura la garde des « amis ».

Instagram , instafriends, instalove


J'ai longtemps cru qu'instagram (IG, pour les intimes) était uniquement une application dévolue à la retouche photo avec de sympathiques filtres vintage qui donnent des allures old school / sans ride à tes portraits. Je suis parfois un peu lente à la compréhension et il m'a fallu un bon moment pour comprendre qu'il s'agissait aussi d'un réseau (et encore, je ne parlerai pas de ma nullité totale à m'adapter à snapchat, j'ai trop honte, je me sens comme le gars de la série « palace » qui s'excite en disant « je l'aurai un jour, je l'aurai ! ».
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Insta, donc, est un réseau social. Sur lequel on peut suivre des stars (j'ai longtemps suivi Britney Spears, si si, et je l'avoue parfois, ses petites robes moulantes me manquent...), des footballeurs, ou tout simplement des gens qui ont des passions proches des tiennes (le scrapbooking, la peinture, le foot, les voyages, la mode, la bouffe healthy, le fitness... les MM's?)
Comme facebook détestait le running, quand j'ai découvert que je pouvais poster là-bas des photos de mes modestes sorties pour la partager avec mes 20 followers, j'étais ravie. J'ai même changé de pseudo, au bout d'un moment, pour bien faire comprendre à ceux que ça n'intéressait pas trop, de quoi j'allais parler dorénavant.
Eivdemment, les premiers temps, je n'avais pas compris le système des hashtags. Je voyais bien que ça renvoyait à quelque chose, mais je ne comprenais pas pourquoi il fallait écrire #courir quand tu courais. Ça se voyait que je courais, avec les chiffres en bas de la photo, et le petit sigle Nike, en haut... Et puis, est-ce que quand tu te baignes, tu écris #jevaismebaigner sur la plage avant de plonger? Je ne crois pas !
Dernier écueil, je ne connaissais pas les codes secrets du running, ce qui me rendait très obscures les publications affichant fièrement les termes EF, AS10, RP et compagnie..
Ici, je marque une pause, et je prends 3 minutes pour expliquer quelques uns de ces sigles à ma sœur qui a la gentillesse de me suivre sur le réseau et de lire quelques unes de mes publications, par conséquent, que ceux qui connaissent tout ça par cœur m'en excusent par avance et sautent au prochain paragraphe.
EF : Endurance Fondamentale = le petit footing du dimanche matin à la cool en papotant avec ta copine, ce moment où tu te plains de Jean-Eudes, ton mari qui regarde trop le foot pendant la coupe du monde et n'a même pas emmené les enfants avec lui quand il est parti à Bricomarché (le rustre).
En réalité, de sombres calculs basés sur la fréquence cardiaque permettent d'établir avec précision la zone dans laquelle tu dois rester pour obtenir un bienfait sur ton rythme cardiaque (mais ça, c'est ptet une légende urbaine de runners, j'attends toujours les statistiques de la Fédération, enfin si Kylian Mbappé fait de l'EF, ok, moi aussi je veux bien m'y coller... ). En EF, tu es lent, mais tout le monde te félicite de te trainer. Par contre, si tu cours trop vite en EF, tu risques de te faire enguirlander par les puristes. Méfiance.
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AS10 ou 21 : le rythme auquel tu aspires sur ta prochaine course de 10km, ou semi marathon. C'est plus rapide que l'EF, tu as le droit de courir vite, mais pas pendant tout ton run, CALMONS-NOUS. En ce moment, le cours de mon AS10 est extra fluctuant, c'est pas bon signe, y pourrait y avoir un crach boursier à ma prochaine course.
RP : le Record Personnel ! Le graal ! Car oui, on le sait, tu n'es pas Usain Bolt. (Tu sais qui c'est?) Tu ne battras jamais le record de France pendant ta vie de coureur. Tu n'es même pas le champion de ton quartier, d'ailleurs. Plus modestement, tu aspires à battre tes propres chronos, à grignoter des minutes , des secondes... mais attention ! Pour certains, un RP doit être battu lors d'une course, et pas en entrainement. Un chrono annoncé par une montre sera rejeté par une bonne partie de la communauté des runners.... alors qu'il s'agit d'un record PERSONNEL. Mais pas tant que ça. C'est un record personnel officiel. (On m'a perdue, si on rajoute l'histoire des courses labellisées par la FFA, je vais en perdre mon latin, c'est trop compliqué ce master Running).
Je crois que ma sœur a eu assez de sigles pour aujourd'hui, je peux donc revenir à mon propos. Instagram ! Le paradis du running et de la runneuse. Des gens regroupés pour se motiver, s'encourager, se féliciter, toussa toussa. Des tas de nouveaux potes à se faire pour remplacer ceux qui t'ont lâchée car "tu cours trop et que tu vas t'abimer la santé à courir comme ça nan mais tu crois quoi."
Insta, c'est vraiment sympa. Par exemple, je vais courir un jour sur 2 à 7h tapantes depuis le début des vacances. Le fait de savoir que je vais faire un petit post sur le réseau avec une photo plus ou moins aboutie et un commentaire un peu débile me donne le petit coup de pied aux fesses qui me permet de sortir du lit. (car soyons sincères, j'ai plutôt envie de paresser au lit que de faire du fractionné, je suis normale... ). Et puis y a des posts rigolos, comme ceux de Maël, par exemple. Et puis y en a qui font rêver avec leurs projets de dingos, comme Camille ou Antoine. Y a les pros de la photos, les fanas des intervalles, les amoureux de la médaille. C'est vrai, quoi, sur Instagram, à me lire, on se croirait dans le monde de Charlotte aux fraises où tout est fraisi fantastique ! « Belle sortie ! Quel chrono ! Bravo pour tes efforts ! Ta motivation me fait rêver ! Bravo, c'est un truc de dingue que tu as fait ». #Happylife.
Mais.... sur insta, y a aussi des tricheurs. Ceux qui font des mega pauses avec la montre arrêtée pendant leurs sorties pour te faire croire qu'ils courent super vite. Ceux qui te montrent jamais ce que racontent leurs applis ou leurs montres, histoire que tu fouilles pas. Y en a même qui arrêtent leurs montres avant l'arrivée en course officielle pour avoir un meilleur chrono à afficher ! Y a aussi des gens qui ne supportent pas ceux qui courent moins vite (ou qui les méprisent), qui critiquent ceux qui font trop de courses, s'agacent de tous ceux qui ne respectent pas les sacro-saintes lois du running. Y a ceux qui se disent tes potes et te tournent le dos avant que tu aies le temps de dire « footing ». Y a ceux qui n'aiment pas telle équipe ou tel jeu de running. Ceux qui trouvent que telle appli c'est de la merde. Ceux qui courent depuis 3 ans et qui se prennent pour des coachs. Et évidemment, y a ceux qui te laissent tomber.
Finalement, les réseaux, c'est comme la vie. Y aura toujours des gens qui seront là pour toi quand tu en auras besoin, ou qui sauront t'appeler quand il le faudra. Y aura forcément des potes éphémères, des gens qui te quitteront. Y aura toujours des râleurs, des gens qui critiquent.
Mais comme dans la vie, tu seras libre de choisir qui tu suis, qui t'impressionne, qui te fait rire, qui te fait rêver. Pour les autres, je te conseille l'option « bloquer » !

lundi 21 mai 2018

Le théorème du dossard



(Aussi appelé : « Viens, on va se faire une petite course,  pour le plaisir ! »)

Chapitre 1 : Genèse

Je m’adresse d’abord à toi, cher lecteur non runner, car je tiens vraiment à ce que tu continues à me lire, et pour ce faire je te garantis une chose : si tu parviens au bout de cet article, tu seras encore plus convaincu, si c’est possible, que ne pas courir est la meilleure chose que tu puisses faire à ton corps, et à ton amour-propre. Sinon, je te filerai une paire de baskets gratos pour que tu puisses souffrir avec moi, j’ai de quoi faire, t’inquiète.

Mais reprenons là où on en était, si vous le voulez bien. On avait donc dépensé le prix d’un séjour aux Maldives en tenues-chaussures-montre-accessoires de running (Et pourtant on se verrait bien en train de siroter une pina colada, avec un petit palmier qui flotte, allongé sur du sable chaud, avec Ryan en train de nous étaler de la crème solaire...soupir... ) et donc on avait commencé fièrement à COURIR !
C’est toujours à ce moment là qu’un pote bien intentionné te sort cette phrase anodine « Hey, tu cours maintenant ? ça te dirait pas qu’on s’inscrive à une course, ce serait pas grave motivant ? ».
Dans 99% des cas, ta réponse devrait automatiquement être « NON, ça ne me dirait pas du tout ! Et maintenant passe moi les chips et la bouteille d’apérol que je nous serve un 4ème Spritz ! ». 
Tu le flaires, le danger ? Qui dit 4ème Spritz dit taux d’alcool au dessus des normales saisonnières, dit décision impulsive particulièrement stupide et que tu regretteras amèrement le lendemain matin, enfin disons à midi, le temps que tes neurones reprennent leur place initiale, un peu moins nombreux.

A la place, tu réponds donc : 
« Allez, chiche ! Si tu le fais, je le fais ! ». Sauf que ton pote te sort direct son MacBook machin chose à 1300€ (pas cher, c’était du reconditionné, une affaire ! » et procède illico à ton inscription aux foulées de la Sardine, une course populaire et conviviale, un teeshirt technique vert fluo et une boite de rillettes de thon offerts à chaque participant, le 14 juin prochain. 

Chapitre 2 : Prise de conscience 

Le lendemain matin, entre 2 dolipranes et 3 cafés, ton portable bippe. Tiens, un mail ? Un mail de... confirmation d’inscription :
Félicitations, vous êtes bien inscrit aux foulées de la sardine, merci de fournir un certificat médical daté de moins d'un an et portant la mention de "non contre indication à la pratique de la course à pied y compris en compétition"

Sueurs froides. Augmentation anormale du rythme cardiaque. Puis, moment de lucidité, tu ne fonces pas directement chez ton médecin, avec l’alcool résiduel dans ton sang, il te collerait direct en cellule de dégrisement. (Méfie toi, ton médecin n’est PAS George Clooney, il ne vient pas au taf après une nuit à boire du champagne avec une ou deux infirmières sexy, il prend ta santé plus au sérieux que son brushing).

Logiquement, tu commences à t’entraîner. Une fois par semaine, c’est bien, déjà, non ? Tu cours vite-vite-vite-vite car tu penses que c’est comme ça que tu deviendras un champion de la course à pied et qu’Instagram t’aimera plus, et tu fonces mentir à ton docteur sur ton état de forme actuel. 
(Je reproduis ici fidèlement l'échange, malgré la confidentialité patient / médecin, ton exemple doit servir à mes chers lecteurs non coureurs qui ne se sont pas encore barrés regarder le replay de Koh Lantah qu'ils ont raté à cause de la messe l'apéro de Pentecôte).
Le docteur :  "Et vous courez depuis longtemps ?"
Toi : "Oh ouiiii oui bien sûr ! (Tu comptes évidemment la course en sac de la kermesse de CE1 et le cross du collège en 4ème B, la seule fois en 4 ans où tu n’avais pas réussi à te faire dispenser par Martine, l’infirmière scolaire que George Clooney n’aurait pas emmenée en soirée car elle avait du poil aux pattes et des dents un peu jaunâtres).
- Ah bien, bien, mais vous courez beaucoup ?
- Oh la, évidemment ! Je fais 20 à 30 km par semaine, docteur ! (Ça c’est en comptant les 18km d’allers-retours à ton frigo pour aller chercher des bières pendant le match OM-Athletico Madrid parce que tu n’as jamais pu t’offrir le fauteuil avec glacière incorporée de Joey dans Friends et que ces 3 buts contre l'OM, ça fait chier quand même, heureusement Griezmann a marqué, c'est un peu comme si la France avait gagné l'Europaligue, du coup ?).
Après quelques pieux mensonges, tu ressors miraculeusement avec ton sésame en main, mais ton taux de crédibilité a pris cher, pense donc à changer de médecin après la course quand tu devras faire soigner ta periosiste / ton syndrome de l’essuie-glace. (ami non runner, tu ne VEUX pas savoir ce que c'est, crois-moi sur parole).



Chapitre 3 : Choc du réel 

La course approche et tu es toujours inscrit. (Les annulations spontanées d'inscription sont rares dans le monde du running, pas de chance).
Ton pote est hyper motivé, il a étrangement perdu 5 kg de gras et pris 3 kg de muscle, tandis que toi, non, vraiment, tu n’as pas changé d’un poil, comme c’est curieux. 
Puisque c’est un vrai ami, il t’a promis de courir avec toi, en mode « On se lâche pas, juré ! », d'ailleurs dans 2 minutes, il te fera le serment des frères de sang qui vont au combat, te voilà rassuré.

Veille de course, tu check désespérément ton Insta pour vérifier les Racepack (ndlr : les vêtements et autres conneries prévus et pris en photos par d’autres fadas qui courent demain) de ceux qui particpent comme toi aux Foulées de la sardine. Pas de bol, demain, ils seront tous sur le marathon de la Truite fumée, et là-bas ils annoncent de la pluie et 19 degrés de moins. Tu dois donc gérer par tes propres moyens et décider tout seul quoi porter (...un teeshirt, un short et des baskets, on se demande pourquoi ça demande autant de réflexion !)
Tu réalises avec effroi que le départ sera donné à 8h30, et que la dernière fois que tu t’es levé aussi tôt un dimanche, en fait, c’est parce que tu ne t’étais pas couché car tu avais fini la soirée en vomissant sur les sandales de Léa, qui ne te parle plus depuis, d’ailleurs.

Chapitre 4 : Bad trip

8h25, tu es allé faire pipi 7 fois, tu t’es piqué les doigts avec tes épingles à nourrice pour accrocher le précieux sur le teeshirt que tu as choisi au terme d’1h30 d’essayages de tenues diverses et variées, tu as répété 27 fois dans ta tête la phrase magique « Mais qu’est-ce que je fous la ??? », tu es prêt à partir. 
Prêt à courir avec plein de gens que tu ne connais pas, en ayant payé pour ça.
Prêt à devenir écarlate et transpirant sous le regard amusé de tes voisins / collègues / élèves / amis, en ayant payé pour ça. Ptet même ton chef, il a entendu dire que tu courais, il aimerait pas rater ça.
Départ de la course, coup de pistolet, tu t'élances, et... 500 m plus loin, ton pote te lâche sournoisement.
« Désolé mais c’est important de suivre son rythme, on se voit à l’arrivée ?! », tu réalises alors qu’il te reste 9km500 à parcourir et que y n’as jamais dépassé les 6 kilomètres, ça va être un très long moment à passer. 
Tout en maudissant Saint décathlon, Saint Nike, Saint François Dhaene et tous les autres saints de la création du running, tu énumères mentalement toutes les activités plus chiantes que celle-ci que tu pourrais faire un dimanche matin (Déjeuner des œufs en gelée chez ta belle-mère, emmener le petit au square et devoir discuter avec la mère de Mathéo des Anges de la télé-réalité, aller à la piscine et choper des champignons sous les pieds, liste non exhaustive). 
Tu manques de t'étouffer avec ton gobelet 100% anti écolo au km5.  
Tu te fais doubler au km8 par Juliette, la maitresse de ta fille cadette, tout sourire dans sa tenue fluo assortie.
Tu aperçois ton chef en train de te prendre en photo avec son Iphone 10 (il mettra tes photos en ligne sur l'intranet du bureau dès ce soir pour faire marrer tes collègues).
Tu reconnais ton pharmacien qui te dit "Allez, c'est presque fini !" Alors qu'il te reste ENCORE 1 km. Tu en profites pour te demander combien font 1 km en mètres, si seulement tu avais un peu écouté Madame Pichu au CE2 au lieu de dessiner des Marsupilami sur ton cahier de brouillon !
Enfin, tu passes l’arche d’arrivée. Tu dégoulines de sueur et tu t’écroules, mal en point, sur la table du ravito (où il ne reste plus que 2 bouts de bananes peu appétissants). 
Ton pote est là, frais comme un gardon, et il t'annonce son chrono comme s'il avait gagné un Oscar et que Scarlett Johansson le lui avait remis en personne. 
Et c'est là, fatalement, qu'il te balance un inévitable et enjoué :
 « On remet ça aux Boucles du merlu, le mois prochain ? Un petit Semi marathon ! Ça fera un beau challenge ! »
Tu n'as pourtant consommé aucun Spritz mais tu entends, malgré toi, ta voix qui lui répond...
 « Excellente idée ! C'était trop génial !". Malédiction, tu as chopé le virus du running.
 
(Cher lecteur non runner, si tu es encore là et que tu penses finalement te convertir à ce sport des plus enrichissants - sauf pour ton compte en banque - je te propose en cadeau au choix, un dossard pour un trail "plage / cailloux / herbes" de 34 km, ou une paire de chaussures de running New Balance bleues pointure 41 (un tiers !). Partant(e) ? )


dimanche 13 mai 2018

Le come back (4 ans, 1 jour, 24 min, 37 secondes plus tard)

Étant donné qu’il m’a fallu 4 ans pour rédiger un nouveau post, on peut s’attendre à du pur génie narratif, de l’éloquence au plus haut niveau, du grand art, un truc digne de Guillaume Musso, mais ptet pas Zola, quand même. 
Sérieusement, qu’est-ce que j’ai fichu pendant 4 ans, et surtout...suis-je toujours une desperate provinciale ? 
Pour le côté provincial, clairement, ça a même empiré : je vis et travaille dans la même petite ville,  je ne peux donc plus faire mes courses, boire un verre ou courir sans saluer une connaissance. D’ailleurs, Charles, un de mes CM1, me l’a bien confirmé : « c’est vrai, maîtresse, l’autre jour, j’étais à Leclerc, y avait une maîtresse de l’école, donc quand on va à Leclerc, on croise toujours une maîtresse. » (Socrate apprécierait certainement cet enfant logique). 
A ce propos, si tu es un tant soit peu observateur, tu noteras que mes élèves s’appellent dorénavant Charles  ou Pauline, et non plus Thyson ou Jarod. Au pire du pire, ils ont des prénoms du style « Timélio » ou « Lolina » . Simple, tu prends des syllabes avec des o et des a, tu mets tout ça dans un shaker, tu agites fortement, ça te fait un prénom ! Assorti avec le double nom de famille en mode « on n’a préféré pas choisir papa ou maman car de toutes façons dans 3 ans on sera séparés », tu obtiens aisément des Matélino Le Cossec - Gosling. (Oui, dans mes rêves, Ryan est père d’élève dans mon école, il organise la tombola de la kermesse ET il accompagne toutes les sorties scolaires. T’es jalouse ?)
Provinciale, donc, plus que jamais, j’y reviendrai certainement ultérieurement, mais je peux juste confesser que je n’organise plus de DÎNERS (de une, parce que je m’en fous, de deux, parce que j’ai bien mieux à faire !).
Et Desperate, donc ? Pendant ces 4 ans, j’ai vaguement tenté de soigner ma dépression post triple maternité, d’abord avec l’alcool (#mojitolover), puis les MM’s, puis les séries télé, jusqu’à ce que je trouve LE remède imparable à la crise de la quarantaine. 
Non, pas le divorce. 
Non, pas les anti dépresseurs mixés dans un Mac Flurry.
Non, pas un 4ème enfant 😱... Déconne pas avec ça !!!!

A la place, Je me suis mise au RUNNING ! (Hé ouais !)
Ça vaaaaaa,  je te vois venir direct, le sourcil relevé, l’air goguenard, et je t’entends déjà penser :
 " Ah ouais l’autre, elle fait son petit footing le dimanche et elle dit running pour se la raconter, déjà son blog s’appelle desperate provinciale, elle peut pas dire femme qui s’ennuie en province, c’est avec des gens comme elle que la langue française disparaît, y a plus de saison ma bonne dame, c’était mieux avant, tout ça."
Mais vois-tu, cher lecteur sceptique, le running, c’est un truc sérieux. Ça ne rigole pas. Ça ne s’improvise pas.
Faut des chaussures, déjà, avec des noms de marques exotiques et des spécificités connues uniquement des initiés : « Tu sais, moi, je cours toujours en saucony, quoi... et toi c’est quoi ton drop ? Nan mais tu préfères vraiment pas les minimalistes ? Sinon j’ai testé Brooks et Hoka one one mais nooon, je supporte pas, trop d'amorti !!!! » (Si tu as compris toute cette phrase, ne panique pas, tu nous fais une petite addiction au running, c’est sans danger, pars vivre quelques temps au Tadjikistan, ça passera en un rien de temps).
Ensuite, il te faut des fringues. Et tu crois pas que tu vas remettre ta tenue d’EPS du collège Pablo Picasso où madame Martineau te faisait faire des tours de stade et où tu essayais de te planquer derrière Stéphanie et Séverine pour en faire le moins possible parce que « courir, sans déconner, c’est vraiment super chiant, quoi ! » 
Non, il te faut le teeshirt respirant / isolant / réfléchissant la nuit et brillant le matin à 57€ chez Odlo, « mais totalement nécessaire »,  le short Nike avec la petite poche derrière pour mettre tes clés « tellement pratique ! », les chaussettes de compression qui te donnent le look de Griezmann à la coupe du monde (j’allais dire Thierry Henry, mais je n’aimerais pas déstabiliser mon lectorat de moins de 30 ans, si tant est que j’en aie jamais eu un...).

Une fois que tu auras vidé le Compte épargne prévu pour les études de tes gosses pour te déguis.. euh, t’équiper comme il se doit, pense aussi à casser ton PEL pour t’offrir l’indispensable montre GPS sans laquelle, franchement, à quoi bon courir ? Parce que tu ne crois quand même pas que tu vas courir pour rien, comme ça, pour le plaisir, librement ? Eh oh, c’est pas l’âge de pierre, tu ne cours pas après le gibier pour nourrir ta tribu ! Tu cours pour une raison VALABLE : être en forme ? Non. Perdre du poids ? Non plus. Partager ta passion avec ton conjoint (Eh, tu nous la fais pas, on t’a vu soupirer bruyamment de désespoir car ta chère et tendre court 5km au rythme où toi tu en fais 12... « Hein mamour c’est trop génial qu’on court ensemble ???... )
Non, si tu cours c’est pour te la RACONTER sur Instagram ! Afficher fièrement ta distance, ton allure, ton chrono, le tout encouragé par une multinationale philanthropique comme Nike dans un post bardé de 34 hashtags (#aimezmoicarjecours).
Donc, moi, c’est simple, pas de montre, pas de running. Ou alors je passe à une de mes 5 applis dédiées sur IPhone. (Toujours avoir un plan B, bon sang. Je sais que tu es trop jeune pour avoir regardé l’agence tout risques, qui est pourtant la dernière chance au dernier moment, mais j’adore quand même quand un plan se déroule sans accro).
Bref, bien équipé pour te la raconter, et nettement moins riche que quand tu te contentais de jouer à Candy Crush en mangeant tes Curlys dans ton canapé, tu seras enfin prêt à passer au stade 2. (Non, pas passer À stade 2, t’es pas Kilian Jornet, tu te calmes direct !) 
Le stade 2, le stade DOSSARD, mais ça, je te le raconterai la prochaine fois, promis.